Formation des maîtres : entrevue avec Louisa Thomassie
Alors que nous nous préparons pour l’institut d’été de formation des maîtres, rencontrons certaines instructrices de l’année dernière. En juillet 2018, nous avons en effet interviewé Rhoda Ezekiel, Vinnie Baron, Louisa Thomassie, Quppia Kaitak et Caroline Inukpuk. Elles nous ont parlé de leur rôle d’instructrices et nous ont fait part de l’importance pour elles de cette communauté d’éducateurs inuits au cours des années. Nous rencontrons aujourd’hui Louisa Thomassie.
Relations publiques : Dites-nous-en un peu plus sur vous et sur la communauté d’où vous venez…
Louisa Thomassie : Je m’appelle Louisa Thomassie et je suis originaire de Kangirsuk. Je travaille aux Services éducatifs où je suis conceptrice de programmes. Je suis responsable du programme d’histoire du secondaire. De façon concrète, mon travail consiste à intégrer plus de contenu autochtone dans le programme d’histoire du Québec. Je travaille aussi à l’élaboration d’un livre d’histoire sur le Nunavik en partenariat avec l’Institut culturel Avataq.
RP : Quel cours donniez-vous à l’institut d’été cette année?
LT : Je donnais le cours de littérature pour enfant, qui vise à ce que les enseignants reconnaissent les différents niveaux et types de lectures permettant aux élèves d’apprendre. En fonction des métaconnaissances des élèves, nous avons déterminé diverses stratégies d’apprentissage pouvant être utilisées par les enseignants. Par exemple, tel élève peut apprendre en lisant un roman, alors qu’un autre apprendra en lisant une bande dessinée. Pendant le cours, les enseignants ont pu explorer différents types de lectures pour déterminer ce qui convient à un élève ou à une tranche d’âge en particulier. De nombreuses activités peuvent être organisées au moyen de livres ou d’histoires. Nous avons donc aussi abordé cette question avec les enseignants.
RP : Que souhaitez-vous que les enseignants retiennent de ce cours?
LT : Je souhaite que les enseignants aient appris à reconnaître les stratégies d’enseignement les plus efficaces pour un groupe d’élèves donné ou un niveau en particulier. Il est essentiel que les enseignants puissent déterminer si leurs élèves sont des apprenants de niveau faible, moyen ou avancé, et ce qui fonctionnera ou ne fonctionnera pas avec eux.
RP : Y a-t-il quelque chose en particulier que vous allez retenir de ce cours?
LT : Nous avions un groupe d’enseignants très expérimentés. Il était évident qu’ils possédaient de solides compétences en gestion de classe. Ils étaient capables de comparer les différents niveaux et classes. Il y a eu un important transfert de connaissances. J’ai apprécié le fait que même si tous étaient là pour apprendre, nous avons été en mesure de nous amuser. Ce groupe d’enseignants avait un excellent sens de l’humour. Je me souviens d’ailleurs d’un après-midi où, après avoir insisté sur l’importance d’être bien préparé et professionnel, je me suis servi d’une histoire pour démontrer ce qu’est une trame narrative. Toutefois, comme les pages du livre n’étaient pas dans le bon ordre, une très grande confusion s’est rapidement installée… Cela nous a bien fait rire!
RP : Était-ce la première fois que vous enseigniez dans le cadre du programme de formation des maîtres? Pourquoi avez-vous décidé y participer?
LT : Oui, c’était ma première expérience à titre d’instructrice dans le programme. Je souhaitais intégrer une plus grande partie du programme d’éducation du Québec dans le contenu de ce cours. J’y ai donc incorporé les compétences liées à la lecture et l’écriture, avec comme objectif de permettre aux enseignants de s’y référer au moment de planifier leurs leçons. J’ai aussi enseigné la littératie inuktitute pendant 13 ans et lorsque j’étudiais à McGill, je me suis consacrée à la littératie anglaise pendant quatre ans. Je souhaitais donc offrir mon expérience au programme de formation des maîtres, mais aussi apprendre des autres enseignants.
RP : Vous avez obtenu un baccalauréat en éducation de l’université McGill en 2017, c’est bien cela?
LT : Oui.
RP : Quel conseil auriez-vous pour la prochaine génération de Nunavimmiut qui envisage une carrière dans l’enseignement?
LT : Je crois que l’éducation est le meilleur investissement que l’on puisse faire. Je dis toujours que l’apprentissage ne vient jamais à échéance et qu’il n’a pas de limites. Nous pouvons réapprendre ce que nous avons oublié; nous pouvons aussi intégrer les connaissances traditionnelles et progresser sur le plan académique. En outre, il existe une grande variété de postes dans le monde de l’éducation. Tout le monde ne peut pas enseigner, il faut très bien se connaître soi-même et être en mesure d’accepter les autres comme ils sont afin de les aider à développer leurs compétences. Je pense aussi que si nous ne sommes pas satisfaits par notre système d’éducation, nous ne pouvons pas nous contenter d’être de passifs spectateurs. Nous devons nous impliquer et voir ce que nous pouvons faire pour l’améliorer. Nous devons faire partie de la communauté d’apprentissage de manière unie, pas dans la division. Selon moi, s’impliquer dans le domaine de l’éducation est le meilleur choix qu’une personne puisse faire!